l’ « Expo Déjantée » été 2016

Ils sont dix-sept artistes à avoir répondu à l’appel lancé par Clotilde Ménard et Pauline pour participer à la deuxième biennale de l’ « Expo Déjantée », nouvelle manifestation de « La Chartre sur les Arts ». Cette nouvelle venue, qu’il ne faut pas chercher sur la carte, se présente un peu comme une utopie : seuls les artistes ont le droit de donner leur nom à une rue ou à une place… l’on pourrait –il est vrai- regarder du côté de La Chartre-sur-le-Loir : de tous temps les rivières et les fleuves ont mêlées leurs eaux à l’inspiration des créateurs en tout genre !

Sans doute, beaucoup ont-ils cru que la mise sur pied de ce salon dans le vaste espace de la salle Guy Lacroix relevait d’une gageure. Au moins cette étape a-t-elle été brillamment franchie, précisément parce que cet espace vide se prêtait à toutes les mises en scènes suggérées par l’imagination. Il manque encore la consécration du public qui – il faut l’espérer- viendra nombreux : il ne sera pas déçu qu’il s’agisse des plus jeunes ou de ceux qui le sont moins mais qui sont toujours attirés par des perspectives inédites. S’il se défile, il le regrettera !

Dès l’entrée, deux guitares fabriquées par Didier Dupont, le luthier de Ruillé et décorées par Pauline dans le style qui lui est propre (la ville, la femme, la musique) donnent le ton : il n’est pas si courant de voir un fabricant d’instruments associé à des peintres et des sculpteurs…On pourrait d’ailleurs en dire autant de « Tatoon », tatoueur installé depuis peu à La Chartre, qui, au moyen de photos, a reconstitué l’histoire de son art dans le monde, à toutes les époques.

Les artistes présents, déjà connus ici ou non, sont venus de toute la région : celle de La Chartre, celle de la Sarthe environnante, celles de l’Indre-et-Loire, du Loir-et-Cher, et même de la Vienne. Ludovic Lepage, par exemple, sculpteur sur métal a fait le déplacement de Châtellerault. Utilisant de préférence de vieilles pièces d’outillage agricole, depuis cinq ans, il les transforme en animaux comme cet éléphant trônant sur un fût métallique, cet aigle déployant ses ailes ou encore ce coq dressé sur ses ergots, constitué d’un assemblage de mâchoires de pièges et de lames de faucilles.

Après l’entrée, s’ouvre une voie qui conduit vers le centre, entouré de rues ou de places (le fil conducteur) cloisonnées par des assemblages de palettes. De place en place, « Arts-totem » et Arno ont érigé des mats ou des pylônes pouvant servir de repères. « Arts-totem », un collectif de jeunes, a privilégié le bois, alors que le second a entassé les vieux barils peints et ornés d’accessoires récupérés.

La voie, elle-même, est un hommage à Patrick Ruillard (Couture) qui rend l’irrationnel sensible à travers ses toiles tandis que ses sculptures expriment la solitude du petit personnage de bronze aux prises avec un univers d’acier implacable. De l’autre côté, après la fresque de Beaumont-sur-Dème, réalisée par les enfants avec Pauline et Arno, font pendant les mosaïques colorées de Christophe Duphil et les premières sculptures de « Tidjé » confectionnées à partir d’éléments métalliques trouvés, dont l’intitulé joue sur les mots pour provoquer la réflexion (« Le maux tard »). Ses œuvres, disséminées un peu partout, ponctuent l’espace.

Au dos des tableaux de Patrick Ruillard l’on trouve les nouvelles créations de Clotilde Ménard célébrant la femme, rassemblant sur elle et autour d’elle des éclairs de teintes vives, bien loin de ses toiles précédentes dédiées à un univers sombre, exposées également ici et là.

« La Mémoire des rues » est illustrée par Pauline dont les toiles traitent toujours en gris des thèmes auxquels elle est attachée : la ville, le temps, la machine, l’écrit : « Il était une femme Dans un royaume féérique Une femme seule Qui attendait sur son balcon Elle regardait au loin… » Un conte ? Peut-être cette vigie contemple-t-elle, au point de s’y perdre, les horizons sans limites de Sabine Dutilh. Non loin Isabelle Martin écarte un instant le voile qui les recouvre pour que nous puissions entrevoir les femmes à demi dissimulées dans ses peintures.

Pour être complet, il faudrait encore évoquer Brigitte Gendron, sculptrice enfermant un prisonnier dans la cage d’une robe à paniers et tentant de remettre le monde à l’endroit, d’Hélène Fontex et de son armée de personnages élancés en robe blanche, d’Annie Galipot, coloriste intuitive dont on n’oubliera pas de si tôt les couples longilignes sortant d’une nuit blanche, de Frank Ficher (Artins), qui cultive aussi bien les arbres que la peinture ou le dessin à l’encre de Chine, de Patrick Lhermite et de ses vastes compositions unissant jaillissements de couleurs et collages, enfin d’Aymeric Vallée, ce jeune artiste prometteur auquel on doit « Le Chariot d’Emboukan » ou « Le Cabinet d’aisance » ou encore « Le Trône » et « Entre Ciel et Terre », une femme ailée mais mutilée, enchaînée à une caisse de munitions.

Tout est à découvrir,tout est à regarder avec attention : un artiste peut apparaitre plusieurs fois sous des jours différents. Osez, à votre tour, être déjantés et donnez à cette  exposition le succès qu’elle mérite.

« L’Expo Déjantée »,salle omnisports Guy Lacroix, 72340 La Chartre, jusqu’au 15 août. Entrée libre, de 11h à 18h.

Xavier Campion

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